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2 mars 2014 7 02 /03 /mars /2014 11:26

note Jean-Claude Barbier, préparée le 11 décembre 2016 pour le séminaire de formation des unitariens à Kigali du 16 au 23 décembre 2013 ; suite de l'article précédent ( lien).

 

- depuis l’édit transylvain de Torda en 1568, nous affirmons la liberté de penser et d’expression ; et donc le vécu démocratique dans nos sociétés civiles et nos communautés.


ferenc_david_torda_1568.jpg

Le théologien hongrois anti-trinitaire Ferencz David, alors chapelain à la cour du roi Jean Sigismond, lors de la "dispute" de Torda


- à la suite d’un Michel Servet, nous estimons que les discours métaphysiques doivent être confrontés à leurs propres sources (voir son ouvrage principal : la Restitution du christianisme) afin de ne pas connaître une dérive inflationniste.
Pour nous, chrétiens, lire les évangiles et le Nouveau testament afin de mieux comprendre Jésus et son mouvement, et non pas de se contenter de résumés, d’extraits ou encore de ce que l’on en dit ici et là.
Mais, ce n’est pas toutefois la ‘Sola Escritura’ car nous ne sommes pas des fondamentalistes ! Ces textes doivent en effet être lus à la lumière des progrès historiques et archéologiques contemporains.
- à la suite d’un Faust Socin, nous tenons compte que l’homme est un être doué de raison et qu’il peut donc – et doit -  critiquer les corpus religieux en faisant le tri entre les faits historiques et les élucubrations métaphysiques irrationnelles (en ce qui concerne le christianisme, le Péché originel, le sacrifice rédempteur de Jésus, etc.).
A noter que c’est ici un point de désaccord avec la tradition anglo-saxonne qui se refuse à toute critique des religions au nom de la liberté de penser (comme par exemple l’unitarisme-universalisme américain).
- nous nous accordons sur un credo minimaliste : pour les chrétiens unitariens, la croyance en l’existence de Dieu (avec le « D » majuscule du monothéisme radical et universel), et l’adhésion à la personne de Jésus (car nous l’aimons) et à son enseignement (car il nous inspire).
- nous établissons la distinction entre ce qui est objectif (par exemple le dogme trinitaire n’est pas dans le Nouveau testament et les anti-trinitaires du XVIème siècle avaient bel et bien raison sur ce point), et ce qui relève des choix personnels au niveau des opinions. Ceci s’applique bien entendu en premier aux prédicateurs.
- les fidèles sont invités à tenir compte des connaissances scientifiques pour l’étude des livres bibliques (une exégèse post-confessionnelle), pour savoir qui fut réellement Jésus (le Jésus de l’Histoire et non celui des métaphysiciens), pour mener une réflexion sur Dieu à partir des progrès actuels de l’astronomie (ce qu’on peut appeler le Dieu du big-bang, un Dieu universel, le même pour tous indépendamment des religions particulières, créateur non seulement de notre espèce humaine, mais de tout l’univers). Voir la revue ‘Le monde de la Bible’.
- nous faisons la distinction entre les engagements communautaires précisés lors de synodes ou d’assemblées générales, et ceux personnels des fidèles (qui relèvent de leur propre liberté de penser dans les limites du vivre ensemble).
- La laïcité nous fait en plus le devoir de séparer la religion de la politique. L’éthique civique que nous devons promouvoir s’arrête à la morale et aux valeurs à défendre, mais ne doit pas empiéter sur le rôle propre des partis politiques qui est d’élaborer des programmes d’action. Jésus est à l’origine de cette laïcité lorsqu’il dit « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».
- le choix d’une religion, d’une Eglise, d’une communauté spirituelle ou religieuse ne doit pas occulter la possibilité d’autres choix tout aussi valables. On choisit parce que l’on aime et parce que cela nous sied et non pas parce que notre appartenance équivaudrait à détenir la Vérité (alors que les autres seraient dans l’erreur). D’autant plus que les choix d’appartenance ne se font pas toujours sur des critères théologiques car entre souvent en compte la proximité du lieu de culte, les relations familiales et sociales, la personnalité du ministre du culte, le style et l’ambiance des assemblées, etc.
10° - Nous pratiquons un christianisme non exclusif des autres Eglises et des autres religions (apport très important de l’unitarisme-universalisme en ce sens). Gandhi disait que chacun veille à vivre sa propre religion dans l’excellence. Pour le protestant libéral Théodore Monod (savant biologiste qui se disait chrétien pré-nicéen), chacun monte la même montagne à sa façon, selon son propre rythme, selon le chemin qu’il choisit ; mais c’est pour rencontrer au sommet le même dieu, le Dieu universel.

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2 mars 2014 7 02 /03 /mars /2014 10:52

note de Jean-Claude Barbier, préparée le 11 décembre 2016 pour le séminaire de formation des unitariens à Kigali du 16 au 23 décembre 2013 ( lien)


L’homme semble être le seul animal dont la production mentale aboutit à des idées, à savoir des concepts qui désignent des réalités tangibles, des faits réels ou encore un ensemble (des catégories concrètes – par exemple « les hommes » - ou invisibles – par exemple « les gaz », ou abstraites par exemple l’éros selon Freud, l’âme selon les spiritualistes, etc.). Celles-ci ne sont forcément liées à l’intelligence, comme par exemple lorsque l’individu reprend tout bonnement les idées de son groupe d’appartenance par soucis de conformisme ou pour, comme on dit, aboyer avec les loups. Nous nous proposons ici de distinguer plusieurs types d’idées.


cerveau_hemispheres_bonheur_travail.jpg

 

Les croyances sont acquises non pas par un effort intellectuel de la personne mais par transmission des générations précédentes : la tradition, la coutume, l’éducation reçue des parents, les corpus religieux, etc. Elles ne sont pas forcément « fausses » et peuvent refléter une sagesse accumulée par les générations précédentes, mais ne sont pas encore vérifiées par la personne et ne s’accompagnent pas de preuves, sinon d’argumentaires communautaires. Par exemple « Je crois en l’existence de Dieu ».
Parmi ces croyances héritées du passé, certaines sont considérées comme désuètes, sans fondement ; on les appelle des « superstitions », par exemple le chiffre 13 porterait malheur (en fait, c’est 12 – chiffre symbolique de la perfection : les 12 mois de l’année, les Douze désignés par Jésus à la tête de son mouvement, etc., plus 1, ce qui fait qu’on tombe dans l’imperfection … qui donc fait courir des risques). A noter que cette superstition est suffisamment répandue pour que les hôtels passent du n° 12 au n° 14  et que certains hôtes invitants ne reçoivent jamais une 13ème personne à leur table !
Les rationalistes de la Libre Pensée (avec majuscules car c’est la désignation d’un mouvement) considèrent que toutes les croyances religieuses sont des superstitions.

Les connaissances, quant à elles, sont vérifiées auprès des savants de son époque, des sciences, des chargés d’enseignement, etc. Elles s’accompagnent de démonstrations objectives, expérimentales ou de faits dûment inventoriés. Elles ont fait l’objet, ou font encore l’objet, de débats intellectuels pour savoir si c’est vraiment vrai tant que la communauté scientifique n’avalise les phénomènes et leur explication.
L’objectif est, non pas la vérité métaphysique, ultime, absolue, comme la pierre philosophale ou la quête du Graal, mais tout simplement la réalité des choses : est-ce que nos idées correspondent aux réalités ; est-ce que je vois la réalité telle qu’elle est. C’est un travail d’appréhension des choses, mais aussi sur soi-même afin que nos perceptions ne soient pas déformées par nos propres idéologies et notre subjectivité.
Les connaissances vont s’appuyer sur l’expérimentation directe : la médecine (qui fait des progrès considérables au XVI° siècle dès lors qu’on pratique la dissection des cadavres et l’analyse anatomique), l’alchimie (certes à la recherche de la combinaison miracle !) ; puis sur la découverte des lois de la Nature (avec Isaac Newton et sa génération) dans la lignée des physiciens grecs (Archimède, les astrologues, etc.) ; enfin sur toutes les sciences. A cette vérification incessante des connaissances par la communauté scientifique, s’ajoute bien sûr, à un niveau plus modeste et individuel, le savoir faire acquis par chaque travailleur, améliorant ses techniques et capable d’innovation. En plus, les cognitivistes considèrent comme des connaissances les souvenirs de tel ou tel moment de notre vie (connaissances épisodiques) et les procédures que nous engageons dans la réalisation d'activités (connaissances procédurales). Les connaissances ne sont donc pas toujours attestées scientifiquement.
Le théisme et le déisme du Siècle des lumières se représenteront un Dieu créateur qui est l’horloger de l’univers, à la fois créateur et régulateur. Il s’ensuivra que Dieu ne peut déroger par une providence occasionnelle aux propres lois qu’il a établi. Le soleil ne peut s’arrêter, même si Josué en a besoin pour continuer à massacrer ses ennemis ! L’univers est devenu lisible, régulier, dépourvu de signes métaphysiques tels que l’étoile des mages.
La connaissance admet qu’on ne sait pas tout ! Elle est progressive et admet ses limites, en espérant qu’un jour elle pourra comprendre.
Il y a un doute métaphysique, qui est celui d’un Sébastien Castellion, précurseur du protestantisme libéral, qui admet son incapacité à se prononcer sur le fondement du dogme trinitaire et il s’affirme en conséquence disposé à recevoir les arguments des uns et des autres à ce sujet.
Il y a un doute rationnel qui, selon le Discours de la méthode de Descartes, fait table-rase du passé : je n’admets que les idées qui sont prouvées (malheureusement sa démarche n’est pas du tout scientifique car il emprunte le cheminement des mathématiques à partir d’un axiome – « je pense donc je suis » - et par déduction des idées les unes des autres alors que chaque idée doit être confrontée à la réalité dont elle veut rendre compte. Voir l’enchaînement catholique des dogmes par déduction dans les Etudes unitariennes (lien).
Certains peuvent préconiser une rupture générationnelle, par exemple l’Américain transcendantaliste Ralph Waldo Emerson qui estime que les individus ne doivent plus être prisonniers des traditions et se mettre dorénavant à penser par eux-mêmes (le cas des unitariens allemands de la DUR avec l’ici et maintenant à la majorité de l’assemblée au jour J).
La démarche scientifique consiste d’abord à enregistrer un certain nombre de faits en précisant leur authenticité ou leur plausibilité (d’où l’importance d’une méthodologie pour qu’un tel recueil soit indiscutable). Puis à émettre une hypothèse explicative de ces faits (il ne s’agit donc pas d’un simple exercice d’imagination, et on s’abstient si les faits sont insuffisants exemple de la langue basque, isolat linguistique). L’enquête expérimentale ou de terrain permettra ensuite de vérifier si cette hypothèse tient la route. A partir de là, le savant peut élaborer une théorie plus générale confirmant ce qui est déjà connu, le précisant, le complétant, le modifiant ou le réfutant. Dans ce dernier cas, il invitera à un changement de paradigme, à savoir des bases de départ et des références habituelles afin de mieux appréhender l’objet étudié.

Les opinions peuvent reprendre les croyances véhiculées de génération en génération ou bien être celles de son groupe d’appartenances (les ‘perroquets’ qui récitent les credo d’Eglise ou les mots d’ordre des partis politiques, ou encore les éditos des journaux, etc.) – elles sont alors d’ordre communautaires et ne se dissocient pas des croyances héritées. Mais elles peuvent être aussi issues de démarches plus individuelles liées à un effort de connaissance et à une expérience de vie.
Alors que la connaissance en reste à une représentation la plus objective possible des réalités, avec critique des représentations usuelles, l’opinion va au-delà. Elle est un choix à partir des connaissances acquises, mais aussi de sa perception intuitive (et donc subjective) des faits et de son expérience de vie. Elle peut motiver des engagements militants lorsque l’opinion se trouve pris dans le tourbillon des débats, des conflits de générations, des convictions personnelles, des choix de vie. N’hésitons donc pas à dire nos options, mais en sachant que d’autres – tout aussi intelligents ! – peuvent faire d’autres choix. La démocratie repose à la fois sur ces engagements et ce respect des autres.

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